Hôtel de La Rochefoucauld, 16 rue de Pontoise
Probablement construit dans la seconde moitié du XVIe siècle, cet hôtel appartient aux La Rochefoucauld de 1604 à 1763. Madame de Sévigné, dans l’une de ses lettres, précise y avoir séjourné en 1673 en compagnie de l’auteur des Maximes, François de La Rochefoucauld (1613-1680). La bâtisse est achetée en 1777 par Charles-Antoine Jombert (1712-1784), libraire et imprimeur. Cette acquisition entraîne la reconstruction totale du bâtiment créant un « grand » et un « petit » hôtel. En 1842, la Ville achète l’hôtel pour y installer la mairie au sein de laquelle on peut également trouver, au XIXe siècle, une bibliothèque et un musée.
Des travaux d’aménagement sont effectués à partir de 1883 puis entre 1893 et 1897 par l’architecte de la ville Henri Choret, entraînant la disparition des corniches et des consoles qui encadraient autrefois les fenêtres. Toujours en cette fin de XIXe siècle, le décor stuqué de la salle des mariages est réalisé par le décorateur Louis Hista (1851-1934). Cette remarquable pièce de style « IIIe République »... peut être visitée sur demande.
Description de l’hôtel actuel
Cet hôtel, actuellement mairie, est un bâtiment en plan en U, plutôt vaste sur quatre niveaux. L’entrée se fait par une cour pavée séparée de la rue par une grille. Le logis principal donne sur un jardin clos.Très remaniée depuis le XIXe siècle, son architecture est sobre. Les façades sur cour sont marquées par une corniche qui souligne le rez-de-chaussée, un encadrement autour des fenêtres du premier étage et une table pour celles du dernier étage.
La travée centrale du corps de bâtiment en fond de cour est agrémentée d’une horloge et d’un balcon à la dernière fenêtre. La façade sur le jardin est plus richement décorée encore.
Histoire
Probablement construit dans la seconde moitié du XVIIe siècle, cet hôtel appartient aux La Rochefoucauld de 1604 à 1763. À la mort d’Alexandre de La Rochefoucauld (1690-1762), son petit-fils Louis-Alexandre de La Rochefoucauld, (1743-1792) hérite, avec l’accord du roi, du titre de 6e duc de La Rochefoucauld. À la même date, il est également fait duc d'Enville. Il effectue la traduction de l’ouvrage Constitution des treize États-Unis de l’Amérique [Philadelphie / Paris, Pierres / Pissot, père & fils, 1783].
Or le duc se désintéresse de l’hôtel. Sa mère Louise Nicole Élisabeth de La Rochefoucauld (1716-1797) le vend le 12 avril 1763 à Jean-Jacques d’Audibert de Corbière, ancien garde du corps du roi.
Le fils de ce dernier, Pierre Laurent d’Audibert de Corbières, lieutenant-colonel de cavalerie, vend la bâtisse le 16 avril 1777 à l’imprimeur-libraire Charles-Antoine Jombert.
Charles-Antoine Jombert (1712-1784)
Ce libraire achète, en 1750, une partie du fonds du libraire Jean Mariette (1660-1742). Le 30 janvier 1754, il rachète l'imprimerie de Joseph Bullot puis s’en démet en faveur de son gendre Louis Cellot en mars 1760. Amateur de sciences, d'art et d'architecture, il est éditeur de nombreux ouvrages de sciences, d'art militaire, d'art et d'architecture… Il republie avec Jacques-François Blondel (1705-1774), l’Architecture françoise, une œuvre théorique majeure de Jean Mariette (1654-1742). On lui doit encore en 1765, le Répertoire des artistes ou Recueil de compositions d'architecture & d'ornemens antiques & modernes.
Devenu presque aveugle en 1777, il se retire à Saint-Germain-en-Laye où il décède le 30 juillet 1784. Il a vendu la plus grande partie de ses collections privées en avril 1776 et son fonds de librairie dès septembre 1775 à son fils Louis-Alexandre Jombert et à son gendre Louis Cellot.
À partir de 1770, il travaille parfois en association avec ses fils Claude-Antoine et Louis-Alexandre Jombert.
Architecture
L’hôtel de La Rochefoucauld est connu par une gravure réalisée en 1777. C’est à l’époque un bâtiment en L ouvrant sur une cour avec sur le côté la cour des écuries. De par sa situation bordant les bâtiments de l’orangerie et de la surintendance, il donne accès au jardin du château royal. C’est un des attraits du bâtiment. Lors de la demande d’agrandissement des jardins, Jombert, alors aveugle, fait écrire « cette maison est très peu considérable par elle-même. […] Elle est exposée au midi que parce quelle est dans le voisinage du jardin appelé le parterre, auquel touche par la cour de la Surintendance et parce quelle est proche de la paroisse, étant située en face de la rue de la Surintendance, qui aboutit à la place de l’église nouvelle et du vieux château. »
Jombert fait réaliser de vastes travaux qui augmentent considérablement la superficie du bâtiment puisqu’on parlera d’un « petit » et d’un « grand » hôtel par la suite. Cet état est connu par un plan de la fin du XVIIIe siècle.
Après la mort de leur père, les héritiers Jombert demandent une estimation de l’hôtel.
En 1786, l’hôtel est revendu à Anne-Nicolas Doublet, marquis de Persan puis passe de propriétaire en propriétaire avant d’être acheté par la ville en 1842.
Des travaux d’aménagement sont effectués par Lesueur et Adam, suivis d’agrandissement en 1883 dont la partie sud-est de la façade sur jardin. Entre 1893 et 1897, la façade est modifiée par l'architecte Henri Choret, architecte de la Ville depuis 1893, entraînant la disparition des corniches et des consoles qui encadraient autrefois les fenêtres.
La salle des mariages est construite lors des travaux d’agrandissement de l’hôtel de ville réalisés entre 1895 et 1897.
Elle est officiellement inaugurée en juillet 1897 en présence de Maurice Berteaux, député et conseiller général de Seine-et-Oise, Léon Désoyer étant maire. Elle est utilisée comme salle des mariages, salle des fêtes et salle de réunion du conseil municipal. Les réunions du conseil s’y tiennent jusqu’à la mise en service de la salle multimédia en 1987.
Elle est l’œuvre de l’architecte Henri Choret et sa décoration est due à Louis Hista.
On doit à Henri Choret, fils et petit-fils d’architecte de nombreuses réalisations, notamment la construction de l’actuel lycée Jean-Baptiste-Poquelin rue Léon-Désoyer et celle de l’ancien lycée de jeunes filles, le lycée Claude-Debussy, rue Alexandre-Dumas, la mairie du Pecq en 1897. Associé à son fils, il construit plusieurs écoles communales.
Quant à Louis Hista (1851-1934), originaire du Nord (né à Aire-sur-la-Lys, Pas-de-Calais), il devient en 1880 professeur des écoles de dessin de la Ville de Paris. En 1885, admis à exposer au salon des Artistes, la direction des Beaux-Arts lui passe une commande : il est chargé de relever les peintures de la chapelle du château de Saint-Germain-en-Laye. En effet, la chapelle est en réfection depuis plusieurs années, Viollet-le-Duc ayant voulu la débarrasser des transformations souhaitées par Louis XIV afin de lui redonner sa pureté gothique initiale. Ces relevés que Louis Hista effectue en collaboration avec M. Lafollye sont exposés au Salon de 1887 et acquis par la direction des Monuments historiques. Il travaille également pour la décoration de monuments publics à Paris comme en province (Collège de France, préfecture de police, cathédrale d’Albi…) et pour l’Exposition universelle de 1900.
Le contrat avec l’artiste est signé par le maire Léon Désoyer en 1897 pour un montant de 5 000 francs de l’époque.
Voici quelques éléments extraits du devis descriptif fait à Paris le 20 mars 1897 par Louis « artiste peintre décorateur, 18 rue Chabrol » pour les travaux de peinture décorative à exécuter dans la salle des mariages de la mairie de Saint-Germain-en-Laye.
« Tonalité générale : grisaille et or. […] Ce parti de grisaille et or est celui adopté dans divers monuments, notamment à la Cour de cassation et au foyer de l’Opéra. […] Les panneaux entre colonnes de la partie longitudinale face aux croisées, la partie du fond de la salle et de l’entrée seront décorés de bordures de feuillage symboliques (oranger), rubans et cartouches contenant les armes de la Ville de Saint-Germain à diverses époques pour donner de la variété sans nuire à l’ensemble. […] Au plafond les figures allégoriques, indiquées sur la maquette d’ensemble ci-jointe, seraient réservées pour un autre crédit. […] Il n’y a de prévu dans le présent devis que les ciels peints colorés en harmonie avec la tonalité de la salle et destinés à donner dans les parties du milieu une impression d’élévation. […] Toute cette décoration serait exécutée sur place d’après les cartons présentés et approuvés par M. l’architecte, directeur des travaux et dans les délais exigés par la Municipalité pour la somme de 5 000 francs nets. »
À signaler que Maurice Denis a conçu deux panneaux décoratifs pour orner, à l’intérieur, les murs de chaque côté de la porte d’entrée ; on peut en trouver les esquisses au musée éponyme. La salle connaît pendant l’été 1991 la restauration des peintures et le nettoyage des colonnes. Les arcades sont percées pour permettre la communication avec la nouvelle salle de réception, aménagée lors des travaux de rénovation de l’hôtel de ville en 1997.
Sources
Journal de Saint-Germain, n° 205 (septembre 1991), n° 318 (31 octobre 1997).
Le Passé recomposé, « Saint-Germain-en-Laye » 1800-1940 (ouvrage édité par l’Inventaire général des monuments, 1997).
Archives municipales, « Hôtel de ville » 1M3.